Michael Wookey, british et parisien
La musique n’a pas de pays paraît-il. Pas de frontières. Pourtant, force est de constater que les anglais ne font pas la même musique que les Espagnols. Ou que les Français. Certains artistes British (David Bowie, Elton John) ont enregistré des chefs d’œuvres ici, sans parler de Jane Birkin, la plus française des anglaises. Qu’est ce qui a donc poussé le britannique Michael Wookey à venir s’installer dans l’hexagone ? « Je suis originaire de Southampton, la ville du Titanic. J’habite en France depuis 10 ans. J’ai fait ma formation en Angleterre, mais je suis venu ici grâce au label Monster K7 qui a sorti une chanson ou je jouais avec des jouets. Ils m’ont invité en France à jouer au divan du Monde. Et j’ai rencontré quelqu’un ici. Je suis tombé amoureux. Je suis reparti quand ça c’est fini, mais je suis revenu pour moi. J’avais passé quelques années à me trouver ici, et je suis revenu pour ça. »
Les racines musicales de Michael Wokey sont absolument anglo-saxonnes. Pourquoi avoir fait le choix de se baser à Paris ? « Dans la culture anglaise, c’est difficile de gagner sa vie avec la musique. Tout le monde a un job en même temps, et moi je ne voulais faire que de la musique. Donc après un an à Londres, je suis revenu à Paris. L’art et la musique sont très respectés en France. Dans chaque ville il y a des théâtres subventionnés, ce qui n’existe pas en Angleterre. »
Son 5ème album, « Hollywood Hex » porte également la trace d’une Amérique déclassée, libre de passer d’un genre à l’autre. D’une introduction qu’on dirait sortie d’une chanson des Pogues (« Shut up and dance with me ») à une ballade aérienne que ne renierait pas Tom Waits (« Living by the sea") tout en scandant à moitié un rap sur « Red hot dollas ». « J’ai fait pas mal de copié collé sur ce nouvel album. J’avais des débuts de tout dans mon téléphone, et je suis parti 5 jours à Las Vegas complètement seul, et j’ai transformé ma chambre d’hôtel avec des bouts d’idées sur des post-it. Et j’ai écrit beaucoup de chansons comme ça. Au bout de 3 jours, ça m’a rendu un peu fou donc je suis allé jouer au casino car c’était la seule façon de voir des gens. Et le fait de ne faire que ça m’a inspiré la chanson « Long live the meadows ». Cette ville est un peu dégoutante, mais ça m’a plu. Surtout l’espoir que les gens y mettent. »
Très décomplexé, l’univers sonore de l’album est peuplé de synthés vintage, de jouets, mais aussi d’une base rythmique feutrée mais plus solide qu’auparavant. « Il y a beaucoup de synthés, des samplers. Tout ce que j’utilise est un peu désaccordé, bon marché. Mon arme secrète, ce sont les petits samplers numériques pour enfants Casio. C’est peut être ça le fil conducteur de ma musique. J’aime beaucoup le côté crade et les bruits parasites, que je garde toujours. »
Mais comment Michael Wookey a t’il façonné l’homogénéité d’un tel album aux plages parfois opposées ? « Il y a quelques années, je me prenais beaucoup la tête sur ça. Maintenant, je pense que j’ai un univers assez fort qui me permet de toucher à plusieurs styles. Je pense que c’est la voix qui fait l’unité entre les morceaux, mais aussi la production. Je pars toujours avec une idée de départ, mais ce n’est jamais réussi. Je respecte mes chansons, je me laisse guider par elles mais ensuite je peux partir dans une autre direction. J’ai mis 5 ans à faire « Hollywood Hex », avec beaucoup de voyages, beaucoup de studios. Et j’aime les albums éclectiques, qui n’ont pas qu’une seule couleur. Tom Waits ou Bowie ont fait des albums très différents et ça ça me plait. »
Mais le musicien hyperactif ne reste pas cloitré dans sa chambre à ressasser les idées à garder pour ses albums, passant de la production pour d’autres artistes à la musique de films, tout en menant le Toy Orchestra avec qui il rentre de résidence en Bretagne : « Je suis toujours tiraillé entre l’idée de rester dans un cocon et celle de socialiser. C’est toujours la bataille dans ma tête. Les albums, mes chansons, c’est un peu mon journal intime, mais j’ai besoin de faire autre chose. La musique de film, il faut travailler avec l’image et ça me donne envie de créer autre chose. La production c’est pareil. Comme ce ne sont pas mes chansons, je suis plus efficace. J’aime tellement la musique. Le moyen de ne faire que ça, c’est de toucher à tout. J’ai appris assez tard à collaborer. Je suis longtemps resté seul dans ma chambre à faire de la musique. Et là je suis avec les gens, je suis obligé de socialiser. »
La musique est finalement toujours le meilleur moyen de rencontrer les gens, même virtuellement, de se faire des amis imaginaires à travers les chansons, leurs histoires, et ce que l’on y projette. Voici donc un nouveau copain anglais, qui sur « Hollywood Hex » nous donne de ses nouvelles et, comme dans sa chanson « Shut up and dance with me », nous donne envie de la fermer et de danser les bras en l’air, avec lui.
SOUS INFLUENCES DIVINES
« J’aime beaucoup « Vespertine » de Bjork. C’est osé, et j’adore tous les petits sons amplifiés. J’ai grandi avec les Beatles, et j’aime tout, du début à la fin. J’aime beaucoup Eels, et je pense que ça s’entend dans ma musique, bien que ce soit beaucoup de guitares. Dans les classiques du cinéma, il y a Hitchcock et Kubrick, particulièrement « The shining ». J’aime aussi l’idée de passer un hiver dans un hôtel comme ça. Ce sont mes deux cinéastes préférés. J’aime bien aussi Wes Anderson, c’est fun et frais comme des jolies fleurs pastels. En littérature, j’aime bien Orwell, la langue de « 1984 ». C’est fou comme il avait raison, le fait qu’on invite les caméras dans nos vies. Et c’est très poétique. J’aime aussi beaucoup William Burroughs. Je l’ai beaucoup lu entre 13 et 15 ans. Son côté bricolo, tragédien, et queer me plait. Et puis le cut up, j’adore l’idée. J’apprécie toujours Charlotte Gainsbourg, je la trouve très belle, et j’aime beaucoup Jodie Foster. Elle est chaleureuse, j’ai envie d’être son ami. »
"Hollywood Hex", nouvel album disponible
En concert à Paris le 25 Mai au Walrus.
Toutes les dates de concert : www.michaelwookey.com