Oh Marie
A l’heure de la révolution Me Too dans le monde de la fiction ou les actrices cherchent leur place nouvelle dans ce nouvel environnement où leur voie (et leur voix) n’est plus à la séduction factice et à la soumission masculine, tomber amoureux d’une actrice (même pour un spectateur homosexuel comme moi) reste quand même l’un des principaux attraits du cinéma et des séries. Il nous faut juste trouver de nouveaux mots, de nouvelles manières de parler de celles qui nous fascinent et dont les émotions nous touchent profondément, sans tomber dans le piège du physique que l’on trouve attrayant et qui souvent minimise l’impact émotionnel et le travail.
Comme beaucoup de monde ces dernières semaines, nous avons été extrêmement ému par le jeu subtil de Marie Colomb dans la série « Culte » qui narre l’aventure de l’émission de télé Loft Story, ou à l’orée des années 2000, le premier programme de télé réalité en France vit le jour. La série raconte plutôt les coulisses de la création en suivant un personnage inspiré de la productrice Alexia Laroche Joubert, des débuts balbutiants de cette alors niche audiovisuelle, jusqu’à son succès public et sa déroute médiatique.
Marie Colomb incarne Loana, l’icône phare du Loft, première star de la télé réalité en France dont les failles et la sensibilité ne se voyaient pas au premier abord, du moins pas autant que sa blondeur et son corps de gogo danseuse. Sauf que nous savons depuis cette époque que Loana en a vu des vertes et des pas mûres, d’une enfance cabossée à la réputation de mauvaise mère, de dépressions documentées à des fluctuations physiques.
L’intelligence de jeu de Marie Colomb a été de combiner ce que l’on découvrait à l’époque (un physique avantageux) à ce que l’on a su ensuite (sa fragilité) et a de fait créé une Loana ultra attachante et émouvante, qui ne lui ressemble pas tout à fait mais dont l’évocation est remplie de sensibilité et d’empathie. Le tout est renforcé par le personnage fictif de Karim interprété par Sami Outalbali, dont Loana devient un objet de fascination, aussi malsaine que compréhensible, comme les spectateurs et les médias qui se sont emparés de cette chair à pétrir pour y projeter tous les fantasmes d’une vie vouée à la galère, et surtout à s’en sortir.
Marie Colomb trouve le même équilibre que l’interprétation de Saint-Laurent par le regretté Gaspard Ulliel, évocation plutôt qu’imitation, et bizarrement nous rappelle l’éclosion de Beatrice Dalle, nature indomptée passée de la bimbo eighties à l’icône pop ultra sensible, et nous touche en plein cœur. Sa voix, son phrasé, ses dents du bonheur et son air farouche ont achevé de nous convaincre malgré l’artificialité (réelle et figurée) de son personnage. Visionnés en rattrapage express, la série « Follow » et le film « La voie royale » (en attendant de binge watcher « As Bestas » et « Les magnétiques ») n’ont fait que confirmer ce que nous pressentions à la vision de « Culte », à savoir un attrait grandissant et une curiosité artistique pour cette actrice dont nous attendons la suite du parcours avec un vif intérêt et une excitation artistique que l’on n’avait pas ressenti depuis longtemps.
Déjà Culte.
Nicolas Vidal
Culte Saison 1 / Actuellement sur Prime
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